Le sentiment de nostalgie a été « objectivement » conceptualisé par la médecine à la fin du 17e siècle, mais ce n’est qu’à la fin du 20e qu’il a fait une entrée (remarquée) dans la sphère marketing. Dans son papier paru sur la revue Management & Avenir, Aurélie Kessous, maître de conférence et spécialiste du rétro-marketing, explique : « Les consommateurs ont besoin d’être rassurés et voient dans les expériences de reconstruction du passé, la possibilité de répondre à une quête de sécurité. La nostalgie devient ainsi un outil marketing au service des marques et leur confère un capital d’authenticité, de longévité et de qualité ». Le consommateur reste particulièrement attaché à la notion d’authenticité car après des années de « consommation frénétique », l’ère du « tout, tout de suite » laisse place à un acte d’achat plus réfléchi qui tient compte de l’amont (bien-être animal, conditions de travail des éleveurs). C’est la conclusion à laquelle a abouti Dynvibe Live, premier observatoire en temps réel des consommateurs, au travers de plus de 200 études de web listening dans le monde. « Le consommateur cherche une cohérence entre ce qu’il est, sa personnalité, ses valeurs et ce qu’il consomme », peut-on lire dans le rapport de l’étude cité par Influencia. Dans le contexte de la filière, les clients/convives de la restauration vont plébisciter un œuf produit en France, de code 0 à 2 (agriculture bio, poules élevées en plein air ou poules élevées au sol), traçable de la fourche à la fourchette et, idéalement, commercialisé par une marque « historique » déjà présente dans sa jeunesse.
Dans la Restauration Hors Foyer (RHF), et en dehors des enseignes conceptuelles, l’œuf « ingrédient » n’est généralement pas perceptible (le code pour le mode d’élevage, les deux lettres du pays de production, l’identifiant du producteur, l’aspect de l’œuf). Il s’agira donc pour les professionnels de la restauration commerciale et collective de valoriser ces attributs par l’affichage sur les murs et sur le menu, et d’informer les serveurs pour qu’ils puissent accompagner le client dans son expérience en lui donnant des indications sur l’origine des produits et les conditions d’approvisionnement. Cette approche s’inscrit pleinement dans le recentrage du restaurant qui (re)devient un lieu où l’on offre une expérience, une ambiance, un décor, dans un contexte marqué par la montée en puissance de la livraison à domicile.
On l’a vu avec le succès mitigé des œufs sans poule. A l’exigence éthique du consommateur, la filière doit apporter une réponse centrée autour du producteur, de l’animal et des conditions d’élevage. Il s’attend à un œuf sans souffrance animale, pas à un œuf sans animal.